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Il faut le dire d’emblée, au risque de se répéter pour que les choses soient claires : le Bay Car Blues Festival est une manifestation annuelle hors du commun et unique à vivre, cette sixième édition l’a une fois de plus confirmé. Tout d’abord par le travail effectué par cette formidable équipe d’environ quatre vingt bénévoles qui se rendent disponibles au delà de leurs possibilités, sont soudés comme les cinq doigts d’une main et véhiculent cet état d’esprit exceptionnel et communicatif qui fait que, dés le premier instant où vous posez le pied à Grande Synthe, un long sentiment de bien être s’empare de votre esprit et de votre corps, pour ne vous lâcher que bien après le jaillissement de la dernière note… Ensuite par les choix effectués par Franck Orts au niveau de la programmation qui ne contente pas d’être d’excellente qualité mais qui cherche à innover et à surprendre toujours et encore pour créer l’événement perpétuel. A l’arrivée, le Festival présente des premières européennes, des plateaux exclusifs à écouter nulle part ailleurs sur le principe : Une formation invite un musicien et aussi, une tribu de rêve d’artistes hexagonaux animateurs sans relâche des jams de fin de soirée et des fameuses Chapelles Blues qui ont précédé dés le dimanche 20, l’ouverture du festival.
De plus en plus nombreuses depuis trois ans, les Chapelles Blues mélange subtilement deux traditions, celle du Carnaval de Dunkerque et celle des Rent House Party Américaines, en accueillant des musiciens français chez des particuliers où l’hospitalité naturelle n’a eu d’égale que la convivialité rencontrée et la générosité ressentie.
D’une chapelle à l’autre, ce ne fut que sourires immaculés sur les visages, comme lors de cet échange de phrasés entre la guitare d’Arnaud Fradin et l’harmonica de Manu Frangeul qui forment un duo issu de Malted Milk, puis, un peu plus tard, les yeux mi-clos d’une belle jeune fille d’où semblait perler quelques larmes pendant que les doigts agiles de Julien Brunetaud s’employaient au piano sur un blues lent soutenu par l’harmonica plaintif de Kevin Doublé, le lendemain, la complicité évidente et bienvenue entre la guitare de Nico Duportal et la contrebasse d’Abdell Bouyousfi, des Rosebud Blue Sauce, qui fournit à ce couple les ingrédients indispensables pour danser un bon vieux Rock’n’Roll, pour finir, ce dernier soir, dans l’allégresse totale quand tout ce beau p’tit monde fut rejoint, à tour de rôle, par la chanteuse Gladys Amoros, les guitaristes Michel Foizon, Miguel M et Mister Tchang, le bassiste Jo Pento, le batteur Cyryl Teid et les membres du groupe Without… Une ambiance chaleureuse, sincère et joviale où le plaisir de se retrouver pour partager, nourriture et boissons, fut le maître mot de chaque chapelle avec cette furieuse envie de se réunir sans clivage de générations.
S’il est un endroit où toutes les générations se rejoignent, c’est bien au Palais du Littoral pour assister aux concerts dans de très bonnes conditions, sonores comme visuelles, notamment grâce à la remarquable retransmission en direct sur deux écrans géants installés sur chaque côté de la scène avec les moyens humains et matériels de la télévision locale ASTV. Ainsi jusqu’à huit cent personnes assises sur des chaises autour des tables non loin des deux grands bars se régalent de bières (à consommer avec modération) à prix très démocratiques servies dans des verres en verre et du spectacle proposé par les artistes.
Le jeudi 28, ce sont les régionaux de Paint it Blue à qui revenait la tâche d’ouvrir les hostilités. Cinq musiciens amateurs, sans complexe et courageux, donnent le meilleur d’eux-mêmes dans un registre de compositions et de reprises respectueuses des traditions. Norman Rosaia à la guitare et Dominique Floch à l’harmonica, partagent le chant, la rythmique assurée par Stéphane Moureau à la batterie et par Stéphane Denoyelle à la basse fait contrepoids avec l’orgue et le clavier de Ludovic Delaere. Au final, des encouragements du public bien mérité qui doivent leur permettre de progresser encore pour sortir d’un relatif anonymat.
Si le Canadien Anthony Gomes, pour sa première en France, n’était évidemment pas connu de grand monde, il réussit toutefois à se mettre la salle dans la poche en quelques titres. Fort de son jeu de guitare démonstratif et de sa voix aux accents gospélisants, il asséna un show rodé et percutant qui fit se lever l’assistance. Un cocktail musical shooté au Blues Rock, acidulé de Slow Blues, dopé au Funk et métissé de Musiques Latines qui transmet toute l’énergie débordante de son groupe. Jon « JC » Coleman, en soutien permanent derrière son orgue et son clavier s’offre avec un malin plaisir en duel avec la guitare de son leader. Il faut dire que la rythmique, dense et échevelée, de Barry Alexander aux baguettes et de Biscuit Miller à la basse n’est pas en reste pour s’offrir, l’un et l’autre, un solo d’un autre monde. Le public ébahit en redemande et Anthony Gomes et ses musiciens ne se font pas prier… En guise de rappel, Gladys Amoros au chant, Dominique Floch à l’harmo et Norman Rosaia à la gratte se sont retrouvés avec le Anthony Gomes Band pour un sympathique échange final.
Le vendredi 29, sur la table de chevet de la chambre qui nous était réservée pour la durée du festival, était délicatement posée une carte avec le contenu du festival. Sur ce carton, un petit mot de Laulo, une responsable de la manifestation. Ce message était écrit en français et dans la langue de « Shakespi…», des « Bitt…», dans la langue de Pétula Clark ; Bref ! Une bien touchante attention.
Un peu plus tard, je découvre la salle où, d’ici quelques dizaines de minutes, va démarrer la 2ème soirée du festival. L’antre du Bay-Car est un endroit fort chaleureux où se mêlent aux rideaux en velours rouges, l’acier des gradins installés en fond de salle. Une multitude de tables occupent le reste de l’espace, apportant une touche « cabaret » des plus conviviale. Trêve de poncifs éculés. Quand je dis poncifs éculés, ne croyez nullement que j’insulte notre Saint Père, le Pape, non ! J’ai trop de respect pour les institutions religieuses, pour oser cela. Enfin, à la radio, y z’ont dis que le Pape s’était fait « introniser » par une pelletée de mecs habillés en robes à dentelles. Après, faut pas s’étonner d’entendre tout ce qu’on entend, mais bon ! Le pauvre, le Pape, le pauvre ; ça doit un peu lui piquer le fond baptismal quand même. Et ça, c’est que le premier jour… Enfin ! Laulo, notre charmante hôtesse, monte sur scène et présente à l’assemblée impatiente, le contenu du soir.
Mike Sanchez tout d’abord, vêtu d’un somptueux costard blanc, banane de rigueur, regard illuminé et rictus inquiétant. En un mot, une réplique blanche de Little Richard. Et vas-y que je t’envoie l’ bousin. Du boogie, du swing et du rock ‘n’ roll exécutés sans concession sur la finesse. Le band qui l’entoure résonne dans l’esprit des années 40, 50. Ces anglais là ne font pas dans la dentelle, heu ! Quand il ne joue pas du piano en chantant, il prend une gratte et expédie un vieux shuffle de chez shuffle. Sa voix puissante et éraillée lui permet de passer d’un timbre de rocker énervé à celui de crooner séducteur, qu’il est sans conteste. En plus de l’énergie, il possède un regard hypnotique toujours tourné vers le public qui l’applaudit sans retenus.
Magie d’une rencontre annoncée… Julien Brunetaud alias J B Boogie rejoint les bouillants britains et entame, solo, un boogie instru suivi d’un blues langoureux qui met au grand jour l’étendue du registre de l’artiste. Son jeu pianistique est certes plus rigoureux, mais aussi plus riche mélodiquement et harmoniquement que celui de Mike Sanchez. Lorsque le quatuor d’outre Manche repointe son nez, la poudre parle rapidement. Les deux pianistes installés face à face dissimulent mal leurs regards envieux de s’affronter amicalement lors d’un duel épique qui se terminera « mano a mano » ou plutôt à quatre mains. Ils se tournent autour, Mike à la rythmique, Julien au chorus ; Julien reprend la main dans les graves pendant que Mike le contourne pour reprendre une impro supersonique. Merveilleux show qui se termine par une apothéose sonore, sulfureuse et un brin déjanté. Un vrai règlement de compte à O.K. BAY-CAR.
Perdue sur les planches comme une petite fille dans une allée d’un hypermarché, Jamie Wood semble ne pas vouloir trop déranger l’auditoire avec son blues fortement teinté de swing. La Californienne a également apporté avec elle, la garde-robe d’Olivia Newton-John dans Grease : Vichy rose à volants très sixties. Sa voix aiguë et acide comme celle d’une chanteuse de country, colle assurément bien avec l’esprit cabaret énoncé au début. J’ai attendu longtemps une seule envolée vocale, mais celle-ci n’est jamais venue. Jamie reste clouée à un registre chanté-parlé qui finit par manquer de nuances. Ses musiciens, eux, (Johnny Rover harmo, Johnny Morgan batterie, Tyler Pedersen contrebasse, Nathan James guitare et Carl Sonny Leyland piano) sont chauffés à blanc lorsque les rejoint le pianiste belge Renaud Patigny. Son boogie énergique donne un boost supplémentaire à l’ensemble. Jamie réapparaît dans une nouvelle robe blanche, façon immaculée contraception, mais ne décolle toujours pas. Renaud Patigny, quant à lui, conclu une belle soirée décidément remarquable au regard des rythmes effrénés des deux formations.
En inversant les deux parties cela aurait peut-être mieux fonctionné au niveau de l’ambiance, mais comme dirait le grand Mike Brant « Qui saura, qui saura, qui saura … ». Après je suis tombé plusieurs fois par terre, mais seul les survivants de la nuit, pourront en parler mieux que moi.
Le samedi 30, la nuit fut courte et chargée en roulé boulé et autres cascades, cette douce journée va s’écouler dans une douce torpeur vers la dernière nuit du festival, déjà la dernière nuit, on serait bien resté quelques mois de plus. De retour dans le palais du littoral, j’ai l’impression de reconnaître la moitié des personnes que je croise. Je serre des tas de mains. J’ai l’impression d’être devenu le meilleur ami de la moitié de la salle et qui sait, ils sont assez fous pour que ce soit le cas.
La soirée débute avec Blues and Trouble et une Gladys Amoros qui avait détruit sa voix tout au long de la semaine. Elle semblait fort désolée de ne pas pouvoir donner tous ce qu’elle sait pouvoir donner. N’ais aucune inquiétude Gladys, tu en as donné beaucoup plus que ne le croit. Posé sur une basse batterie solide (François Gautier et Ludovic Timoteo), épaulé par le clavier de Stéphane Cailladet, Michel Foison a posé ses envolées de guitare sur un tapis de gospel, soulisant du plus bel effet et parfaitement en phase avec le timbre de voix de Gladys. Entre chaque titre elle remerciera tour à tour ; les organisateurs, les bénévoles, les gens des chapelles, les autres musiciens, les techniciens, la Tv locale, les gens de la sécurité, l’architecte de la salle, le boulangé du coin, bref j’ai un peu souri en imaginant qu’elle allait remercier la moitié de la ville, mais elle a su le faire d’une façon très touchante et qui en définitif n’avait rien de pesant. Chacun de nous est sorti de là avec un bon gros semi-remorque d’amour à distribuer autour de lui, merci Blues and Trouble de tant de générosité.
Le temps de souffler, (une ou deux bières) c’est Kevin Mark qui s’y colle. J’avoue que je l’ai croisé avant le concert et que son look mi-camionneur, mi-bikeur tatoué, j’ai craint d’assister à un show très Rock mais c’est un autre homme qui est arrivé sur scène. Costume, grosse voix et belles guitares entouré d’une fine équipe, Robert Marcheterre à la batterie, Costa Zafiropoulos à la contrebasse, Martin Gagnon au piano, Mathieu Mousseau au sax baryton et surtout, celui qui m’a le plus impressionner par sa pêche et sa musicalité, Frankie Thiffault au sax. Leur Blues flirte avec le Swing, le Rythm’n’Blues ou le Rock en gardant une énergie à faire lever les salles. Kevin Mark a su prendre le temps de nous tricoter de beaux solos de guitare sans s’étaler en longueurs inutiles. En bon leader, il a su distribuer les interventions des musiciens et même s’effacer pour mettre en avant Frankie Thiffault, jusqu'à prendre complètement un rôle de sideman à l’arrivée de Roxanne Potvin.
La jeune canadienne a fait chavirer les cœurs, et s’il est vrai que son jeu de guitare est fort intéressant, il faut encore le laisser doucement se polir au fil des concerts. Sa voix un peu haut perchée et nasillarde, conviendrait parfaitement à un répertoire Country mais demande encore à être un peu forgée pour finir de me toucher. Surveillons de prêt cette jeune femme, elle pourrait un jour, faire partie des références.
La clôture, déjà , de ce fabuleux festival revenais à Lonnie Brooks, mais c’est son fils, Wayne Brooks Baker, qui ouvre le bal avant l’arrivée du père. La batterie de Mike Rodbard est puissante sans manquer de finesse. Le bassiste Andre Howard m’a impressionné à un niveau rare. Mêlant ligne de base et coups de folie avec un groove à faire danser les comateux. « Pour Noël je veux un groove comme le monsieur ». J’ai un peu moins prêté attention à Brian James derrière ses claviers. Il faut dire que les autres assuraient le show avec quelques pas de danse synchronisée pendant ses solos. Le premier set, plutôt Blues Rock, mené par un Wayne Brooks convainquant au chant comme à la guitare a basculé vers un Blues plus traditionnel à l’arrivée de Lonnie Brooks. Et si Wayne s’est montré irréprochable en sideman, privilégiant des riffs basiques et efficaces pour laisser toute latitude à papa Brooks, ce dernier m’a laissé une impression plus mitigée. Par moments j’ai trouvé certains de ses solos vraiment limite, à d’autres il a su les charger d’une émotion rare. Mais la cohésion de l’ensemble, le sens du show et le rappel presque aussi long que le show ont fini de faire de cette soirée un moment mémorable. Quand la salle s’est allumée, on sentait que le public avait du mal à quitter les lieux, à se dire qu’il faudrait maintenant attendre un an pour ce replonger dans cette ambiance.
Les plus nostalgiques ou les plus courageux peut être, ont comme tous les soirs finis la nuit au Zapin’ où les attendaient une ribambelle de musiciens. L’ambiance de franche camaraderie, et la convivialité du lieu rendent ces afters aussi attrayant pour les rencontres que l’on y fait que pour les bœufs qui s’y déroules. Je ne citerai pas les musiciens qui se sont succédés sur les planches, ils étaient trop nombreux pour que j’en oublie aucun. Mais on y a vu aussi bien les têtes d’affiche du festival que les animateurs de chapelles et les mélanges musicaux qui en découlées contribuent encore un peu plus à faire de ce festival un moment d’exception qu’il ne faut pas rater.
Bravo à tous ceux qui par leur intervention, leur travail, ont permis à cette manifestation de devenir l’un des rendez-vous incontournables de tout amateur de Blues, mais surtout l’un des moments les plus conviviaux et agréables de l’année.
Dominique Floch
Norman Rosaia
Anthony Gomes
Jon JC Coleman
Mike Sanchez
Mike Sanchez
Mike Sanchez Julien Brunetaud
Renaud Patigny
Carl Sonny Leyland
Gladys Amoros
Michel Foison
Kevin Mark
Kevin Mark
Kevin Mark et Roxane Potvin
Roxanne Potvin
Lonnie Brooks
Lonnie Brooks
Lonnie Brooks
Roxane et kevin en boeuf
Jamie Wood
Lucky Jean Luc, Mad Man & Pascal Lob
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Xavier Caupenne
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